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L’Agence des médicaments du Canada publie un nouveau rapport sur les tests de dépistage des déficits enzymatiques chez les patients et patientes recevant une chimiothérapie à base de fluoropyrimidine

L’Agence des médicaments du Canada a réalisé une nouvelle évaluation des technologies de la santé afin d’examiner l’évolution du dépistage du déficit en enzyme dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD) chez les patients et patientes du Canada qui reçoivent une chimiothérapie à base de fluoropyrimidine, comme le 5-fluorouracil ou la capécitabine. L’examen met en évidence que, bien que le test de dépistage du déficit en DPD soit désormais disponible dans certaines régions du Canada, l’accès à ce test reste inégal entre les provinces et territoires, ce qui soulève des préoccupations quant à l’équité des soins prodigués.

Entre le 1er janvier 2019 et le 5 février 2025, Santé Canada a reçu 10 rapports faisant état d’effets toxiques graves liés à une chimiothérapie à action générale à base de fluoropyrimidine chez des patients et patientes du Canada présentant un déficit en DPD. Sur 10 cas, 6 décès ont été enregistrés. Il en ressort plusieurs messages clés à l’intention des personnes qui exercent une profession de la santé, notamment la nécessité de mieux sensibiliser à la déficience en DPD, d’envisager des tests chez les patients et patientes qui reçoivent un traitement à base de fluoropyrimidine, et de reconnaitre les limites des méthodes de dépistage actuelles.

Quelle est la situation?

Les fluoropyrimidines sont couramment utilisées pour traiter les cancers à tumeurs solides, mais les patients et patientes présentant un déficit en DPD (l’enzyme nécessaire à la dégradation de ces médicaments) courent un risque élevé d’effets toxiques grave, voire de décès. 

À l’international, le dépistage préalable au traitement d’un déficit en DPD, par génotypage ou phénotypage, est recommandé afin de réduire les effets indésirables des médicaments au moyen d’une adaptation posologique. Cependant, les données probantes qui appuient cette approche reposent largement sur des variants génétiques se trouvant chez des personnes originaires de pays européens. Cette dépendance à l’égard des données européennes soulève des questions quant à la sécurité et à l’efficacité de ces mesures lorsqu’elles sont appliquées à une population ethniquement diversifiée comme celle du Canada, ce qui est encore aggravé par l’accès inégal aux tests de dépistage du déficit en DPD au pays.

Qu’avons-nous fait?

Une enquête a été menée afin d’évaluer l’état actuel des tests de dépistage du déficit en DPD au Canada. Parallèlement, nous avons procédé à un examen rapide afin de recenser et de résumer les données probantes sur l’efficacité clinique et le rapport cout/efficacité des tests de dépistage d’un déficit en DPD et des adaptations posologiques guidées par les résultats de ces tests comparativement aux soins usuels.

Qu’avons-nous trouvé?

Les résultats de notre enquête indiquent qu’au moment de la réalisation de l’enquête, le génotypage du gène de la dihydropyrimidine déshydrogénase (gène DPYD) était effectué dans cinq provinces canadiennes, une province offrant également le phénotypage de la DPD au besoin, et que les couts des tests variaient entre 50 $ et 500 $, selon la plateforme de test et le délai d’exécution requis. En outre, les résultats indiquent que les données à l’appui de la posologie en fonction du génotype proviennent principalement de populations étudiées en Europe, ce qui confirme les limites de leur applicabilité dans le contexte multiethnique du Canada. Des recherches supplémentaires doivent être menées et des lignes directrices élaborées afin de valider et d’établir l’utilité des variantes génétiques plus courantes dans les populations extérieures à l’Europe.

Qu’est-ce que ça signifie?

À la lumière des données probantes colligées, le génotypage du gène DPYD pourrait constituer une stratégie cliniquement valide et rentable pour améliorer l’innocuité d’une chimiothérapie à base de fluoropyrimidines pour les personnes vivant au Canada qui sont d’ascendance européenne. Cependant, compte tenu du manque de données fiables pour d’autres groupes ethniques, l’applicabilité à plus grande échelle de ce test demeure incertaine. Il est recommandé aux médecins en pratique clinique et aux décisionnaires d’utiliser les résultats présentés ici pour éclairer les discussions sur la mise en œuvre du test de dépistage du déficit en DPD au Canada, en gardant à l’esprit la sécurité des patients et patientes ainsi que l’équité en matière de santé.